L’Université de Barcelone (UB) a dévoilé mardi une découverte entièrement inédite, considérée comme ayant une « grande valeur philologique et historique, car elle représente la première œuvre épique écrite en espagnol avec Christophe Colomb comme protagoniste ».
Le document serait passé inaperçu aux chercheurs, bien qu’il figure comme une brève référence dans un ancien catalogue compilé par le père Alexandre Olivar en 1977.
Le manuscrit, d’environ 40 pages et présentant des différences notables par rapport à l’édition imprimée de 1701, contient des extraits qui n’étaient pas contenus dans le texte connu jusqu’à présent, dont certains pourraient avoir été effacés ou modifiés pour des raisons idéologiques.
La découverte a été réalisée par la chercheuse postdoctorale Claudia García-Minguillán.
Le poème présente Colomb comme un héros de l’imaginaire politique du début du XVIIIe siècle et s’inscrit dans une période de forte tension dynastique, peu avant le début de la Guerre de Succession d’Espagne.
Le contexte dans lequel l’œuvre a été écrite — Barcelone en 1701 — est fondamental pour comprendre la stratégie de Botelho de Moraes et Vasconcelos, figure intimement liée à la scène intellectuelle et diplomatique de la ville et associée aux cercles autrichiens.
L’auteur a participé à la fondation de l’Académie des Défiants, prédécesseur de l’actuelle Académie Royale de Lettres de Barcelone, et a clairement engagé un engagement littéraire à lier les prouesses de Colomb aux valeurs politiques des partisans de l’archiduc Charles d’Autriche.
Le manuscrit, qui fera maintenant l’objet d’une édition critique et d’une étude monographique, révèle également une intention esthétique singulière : bien qu’écrit en espagnol, la composition suit des modèles épiques classiques plus courants dans les traditions latine et italienne.
Le choix de l’espagnol, dans ce cas, répondrait à un désir d’intervenir dans le débat culturel et idéologique de la monarchie espagnole, a soutenu la chercheuse.
La découverte a été rendue possible grâce à une recherche systématique des archives de la bibliothèque monastique et à un croisement de références bibliographiques avec des matériaux manuscrits non catalogués.
Selon García-Minguillán, « le manuscrit est resté en dehors des circuits habituels de recherche pendant des décennies, car il n’a jamais été numérisé ou transcrit, et son auteur n’a pas été explicitement identifié dans aucune base de données moderne ».
L’étude de ‘El Nuevo Mundo’ s’inscrit dans un projet de recherche plus vaste, soutenu par le Ministère de la Science, de l’Innovation et des Universités d’Espagne, par le Service Allemand d’Échanges Académiques (DAAD) et par la Fondation Calouste Gulbenkian, visant à reconstruire les motivations politiques, littéraires et culturelles de Botelho de Moraes et Vasconcelos, ainsi que les dynamiques de création et de censure dans la sphère littéraire de la Barcelone baroque.