Carina Palma est infirmière spécialisée en santé maternelle et obstétrique, mais elle est aussi mère. La naissance de sa fille a apporté une « transformation profonde » à sa vie, notamment lors du post-partum, période durant laquelle elle a senti que, malgré toute sa formation dans le domaine, « elle échouait ».
Sachant que ce sentiment est très courant parmi les nouvelles mamans et croyant qu’il est nécessaire de donner plus d’attention et de soutien aux femmes pendant cette période, Carina a décidé d’écrire un livre sur l’importance de l’autosoin et de l’autocompassion.
Comme le souligne la professionnelle de santé dans le livre ‘Mães Invencíveis, Mulheres Invisíveis’, édité chez Oficina do Livro, « nous vivons encore dans une culture qui nourrit la croyance qu’au moment où le bébé naît, la femme devient invisible », et c’est ce que Carina Palma veut aider à changer.
Je me suis sentie très seule, j’ai douté de toutes mes capacités et j’ai eu beaucoup de difficulté à réellement regarder ma fille, sans le regard professionnel.
Avez-vous commencé à écrire ‘Mães Invencíveis, Mulheres Invisíveis’ pendant votre post-partum ? Bien qu’étant infirmière spécialisée en santé maternelle et obstétrique, pensez-vous qu’en tant que mère, vous manquiez également d’informations pour faire face à tous les défis que cette phase apporte ?
Oui, sans aucun doute. En tant qu’infirmière spécialisée, avec une vaste expérience avec les mères et les bébés, j’ai créé l’attente que cela allait être très facile. Après tout, s’occuper d’un bébé était quelque chose que je faisais les yeux fermés. J’ai aussi pensé, après un accouchement naturel merveilleux et avoir beaucoup investi dans mon développement personnel, que je ne « sombrerais » pas. Alors oui, il me manquait beaucoup d’informations, notamment le fait que les bébés ne suivent pas le manuel et que les mères, qui renaissent avec le bébé, ont besoin d’aide. Je me suis sentie très seule, j’ai douté de toutes mes capacités et j’ai eu beaucoup de difficulté à regarder réellement ma fille, sans le regard professionnel. C’était un défi de m’accrocher à mon instinct maternel, au milieu de tant de culpabilité et du sentiment d’échec.
Quels sont les principaux défis auxquels les mères sont confrontées pendant le post-partum ?
Il y en a plusieurs, mais je dirais que les principaux sont le sentiment d’invisibilité, la solitude, la culpabilité et le sentiment de ne pas faire les choses correctement, les défis en couple, la comparaison avec d’autres mères, et le fait de ne pas pouvoir se placer comme priorité. Quand un bébé naît, il y a une femme qui se tait pour donner de l’espace à la mère qui commence à se créer. Une mère peut-être insécurisée, fragile, avec des hormones en ébullition qui se réorganisent. Une mère qui a peut-être eu un accouchement difficile, qui n’a peut-être pas réussi à allaiter et qui, par conséquent, pense avoir échoué. Ou, au contraire, une mère qui a eu tout ce qu’elle désirait et, malgré cela, au milieu de tant de pleurs et de privation de sommeil, pense qu’elle fait quelque chose de mal, doute d’elle-même. Et avec toute cette incertitude et cette peur du jugement, il est habituel que les mères s’isolent, qu’elles restent dans leur bulle sans demander d’aide. Par conséquent, il y a une plus grande fragilité émotionnelle.
On apprend comment prendre soin d’un bébé, mais on n’apprend pas comment prendre soin d’une mère.
Il ne manque pas de littérature sur la façon de s’occuper des bébés, ce qu’il faut faire ou ne pas faire, comment favoriser le sommeil, les soins, l’alimentation, l’allaitement, etc. Mais il n’y a pas, du moins au Portugal, beaucoup de livres qui parlent de la mère et de la façon dont elle doit être traitée, ni de l’importance de l’autosoin. Pensez-vous que cela reflète notre société ?
Oui, les soins post-partum sont encore très axés sur la prise en charge du bébé. Il existe de nombreux livres, vidéos et cours sur comment changer une couche ou donner le bain à un bébé, par exemple (ce sont d’ailleurs des sujets que de nombreux parents demandent encore lors des consultations pendant la grossesse), mais peu sur les soins à la mère. Et je pense que c’est un reflet de la société, c’est culturel.
Quand je demande à une femme enceinte si elle a déjà pensé au post-partum (des choses plus pratiques comme la planification des repas, le soutien avec le bébé, le ménage, le repos, le réseau de soutien), la réponse est principalement dirigée vers le trousseau du bébé. Quand je demande à une mère comment cette expérience se passe, elle aborde facilement des sujets comme « l’allaitement se passe mieux maintenant, elle se réveille toujours la nuit, elle a déjà pris du poids… ». Et quand je demande, « d’accord, et comment vous sentez-vous? », il y a quelques minutes de silence, car c’est une question rarement posée. Quand le bébé naît et que le couple reçoit des visites, l’attention se tourne vers le bébé, qui est si mignon, et la mère reste là, invisible, croyant que ce moment est uniquement pour le bébé, activant encore plus son sentiment de ne pas mériter. Bien sûr, avec toutes ces habitudes bien ancrées, la mère pense que ses besoins ne sont pas importants. C’est général. On apprend comment prendre soin d’un bébé, mais on n’apprend pas comment prendre soin d’une mère, qui ne sait peut-être même pas qui elle est.
Dans le livre, vous donnez des exemples de pays qui ont des traditions axées sur les soins à la femme pendant le post-partum. Que pensez-vous qu’il est nécessaire de faire pour introduire des changements au Portugal ?
Eh bien, ce serait bien de pouvoir rêver et réaliser cela maintenant [rires]. Nous vivons dans une ère d’information abondante, peut-être même excessive, ce qui apporte également plus de confusion et de bruit. Mais les changements passent par le fait de continuer à donner de la voix à ce sujet, sans être oublié ou perdu :
– Sensibilisation de la société (campagnes publiques, témoignages réels, diffusion de récits réels et humains dans les médias) ;
– Éducation et formation des professionnels de santé (pour aborder ce sujet dans les hôpitaux et centres de santé) ;
– Intégration de réseaux de soutien et de services communautaires (centres de soutien à la parentalité/maternité ; visites postnatales à domicile) ;
– Pression politique et création de politiques publiques (proposer des politiques de santé maternelle incluant des soins post-partum au-delà des 6 semaines, créer des incitations financières et logistiques pour soutenir le repos de la mère, comme le congé partagé prolongé, les aides à domicile ou les groupes de soutien gratuits, travailler avec des associations d’usagers, des ordres professionnels et des députés pour présenter des propositions concrètes…) ;
– Autonomisation et sensibilisation des femmes elles-mêmes (offrir des informations claires, accessibles et empathiques, comme je le fais dans mon livre ; créer des espaces d’écoute et de partage entre mères, où l’on ressent sécurité, validation et orientation, encourager chaque femme à se préparer non seulement pour l’accouchement, mais pour sa propre renaissance).
De quoi a le plus besoin une mère en post-partum ? Sentir qu’elle n’est pas seule. Qu’elle a un soutien et non des yeux qui la surveillent.
Quels conseils donneriez-vous à une mère/belle-mère qui va devenir grand-mère pour la première fois ?
C’est une question intéressante et très curieuse. Ma belle-mère a acheté le livre, l’a lu et m’a dit « j’aimerais l’avoir lu à l’époque, cela aurait été plus facile. J’ai appris beaucoup de choses dont je n’avais pas la moindre idée à l’époque. Et j’ai eu tort. » Alors je sens que ce livre va vraiment inspirer les grands-mères. Mes conseils ou suggestions seraient :
– Rappelez-vous : votre fille/belle-fille devient mère, mais elle continue d’avoir besoin de vous – Elle renaît, vulnérable et puissante à la fois. Écoutez avec le cœur, offrez votre présence et votre aide au lieu de conseils qui parfois la rendent plus triste ;
– Soutenez, ne remplacez pas : Elle a besoin d’être reconnue comme la mère du bébé. Offrez votre aide pour qu’elle se repose, se nourrisse et se connecte avec le bébé, sans prendre sa place (par exemple : au lieu de prendre le bébé, peut-être est-il préférable de lui faire du thé, cuisiner ou ranger la maison) ;
– Respectez ses choix, même s’ils sont différents des vôtres. La façon d’allaiter, le type de naissance choisi, l’alimentation ou le sommeil… tout peut être différent de votre époque. Et c’est bien. Vous pouvez partager des souvenirs, mais pas comme des règles ou « à mon époque, ce n’était pas ainsi ». Accueillez, demandez : « Comment puis-je vous soutenir dans vos choix? » ;
– Demandez la permission avant de donner votre avis ou d’agir – Même avec de bonnes intentions, ne prenez pas de décisions pour elle, ni avec le bébé, ni avec la maison. Demandez : « Voulez-vous que je vous dise ce que je pense ? »; « Voulez-vous de l’aide pour cela ? »; « Avez-vous besoin de moi maintenant ou préférez-vous un temps juste pour vous trois ? ».
– Offrez une sécurité émotionnelle, pas de jugements – Le post-partum est un tourbillon. Elle peut pleurer, rire, être fatiguée, incertaine ou très confiante. Tout cela est normal. Ce n’est pas le moment d’évaluer, de corriger ou de comparer. De quoi a le plus besoin cette mère ? De sentir qu’elle n’est pas seule. Qu’elle a un soutien et non des yeux à la surveiller.
– Prenez soin de la mère, et pas seulement du bébé. Tout le monde regardera le nouveau-né. Peu de gens regardent la nouvelle maman. Vous pouvez être cette belle exception : « As-tu bien dormi ? »; « Veux-tu que je t’apporte de la soupe »; « As-tu besoin de prendre un bain sans hâte ? ». Sans rancune. Si vous sentez que vous ne l’avez pas eu à l’époque, vous avez maintenant l’occasion de faire la paix avec ce sentiment, et d’être gentil et bienveillant…croyez-moi, vous allez vous sentir très heureux.
– Honorez votre nouveau rôle, avec amour et humilité. Être grand-mère est un présent. Et c’est aussi une invitation à laisser votre fille/belle-fille briller dans sa maternité. Être à côté, pas en avant. Être proche, mais avec de l’espace.
Le post-partum ne se mesure pas en semaines, il se mesure en couches.
Et pour les maris? Dans le livre, vous parlez d’un mari qui ne comprenait pas comment sa femme pouvait encore être en post-partum quand le bébé avait quatre mois…
Oui. C’est l’un des grands reflets de notre société : une profonde méconnaissance (et, souvent, un mépris) de ce qu’est réellement le post-partum, surtout pour la femme. Lorsqu’un homme dit « mais cela fait déjà quatre mois », ce qui est implicite, c’est que ce qui est visible (le bébé) a déjà changé, donc ce qui est invisible (l’état interne de la femme) devrait également être passé. Mais comme je le dis dans le livre, le post-partum n’a pas de date de péremption. Et être le compagnon à cette phase exige plus que de l’amour — cela exige de la conscience. Voici donc mes suggestions pour les maris :
– Le post-partum n’a pas de délai, il a un processus. Votre femme n’est pas redevenue celle qu’elle était. Et elle ne le doit pas. Elle est en train de devenir. Elle guérit, s’intègre, apprend à connaître le bébé et elle-même, tout en même temps. Elle a besoin que vous sachiez : le post-partum ne se mesure pas en semaines, il se mesure en couches.
– Soyez le refuge sûr, pas le vérificateur d’émotions. Elle n’a pas besoin de quelqu’un qui dit « tu dois être plus positive », « tu es toujours fatiguée », « tu devrais être heureuse ». Elle a besoin d’un regard qui dit : « je suis ici avec toi, même lorsque je ne comprends pas tout ».
– Apprenez, demandez, participez. Lisez, informez-vous, demandez comment elle va (vraiment), assumez des tâches sans attendre qu’elle le dise. Rappelez-vous que vous n’êtes pas l’aide, vous êtes le père, le compagnon, une partie active de la famille.
– Votre soutien peut être plus important que celui de sa propre mère. Saviez-vous que la façon dont le partenaire soutient la femme pendant le post-partum a un impact direct sur sa récupération émotionnelle et physique ? Votre amour prend maintenant la forme d’actions : lui donner le temps de se reposer, protéger son espace, valider ses décisions…
– Parlez moins, écoutez plus : Toutes ses douleurs n’ont pas besoin de solution. Certaines ont juste besoin de présence. La phrase « je suis ici avec toi, même sans savoir quoi dire » a plus de valeur que mille conseils.
– Rappelez-vous : aimer un bébé, c’est aussi aimer la femme qui l’a mis au monde. Occupez-vous d’elle. Donnez-lui du soutien. Dites-lui qu’elle fait de son mieux. Que vous la voyez. Parce que, souvent, elle se sent invisible. Et votre regard peut être ce qui la garde debout.
Le post-partum n’est pas seulement l’odeur du bébé. C’est aussi des pleurs, de la solitude, de la colère, de la frustration et beaucoup de vulnérabilité.
Et comment les futures mères peuvent-elles se préparer pour le tourbillon du post-partum?
Une excellente question, trop souvent ignorée. Dans mon livre, je parle de diverses stratégies. Le post-partum est réel, intense, transformateur… mais il est souvent idéalisé ou passé sous silence. Se préparer ne signifie pas éviter le tourbillon, mais savoir y nager sans se noyer. Se préparer pour le post-partum est aussi important que de se préparer pour l’accouchement. Il existe des moyens profonds, pratiques et conscients pour une femme enceinte de se préparer pour le post-partum, basés sur l’équilibre entre la science, la sagesse intérieure et la réalité émotionnelle, ce que je défends toujours :
– Comprendre que le post-partum commence avant l’accouchement. Le corps va accoucher d’un bébé, mais l’ ‘âme’ va accoucher d’une nouvelle femme. Important de s’informer sur ce qui change dans son corps et son esprit après l’accouchement (hormones, sommeil, émotions, allaitement, identité), en choisissant des sources sûres et réelles ;
– Avoir un ‘plan post-partum’ aussi sérieux qu’un ‘plan de naissance’ – Qui va cuisiner ? Qui nettoie la maison ? Qui écoutera sans jugement ? Il est important d’établir un plan pratique, émotionnel et logistique au moins pour les 40 premiers jours : Qui sera disponible pour soutenir (sans envahir) ? Quels aliments/repas vais-je préparer pour me nourrir ? Comment vais-je protéger mon repos et mon espace ? Quels signes d’alerte vais-je reconnaître si je ressens une tristesse persistante ou une fatigue extrême ?
– Préparer émotionnellement le partenaire et la famille – Les personnes impliquées doivent savoir que la priorité est la femme. Expliquer avant la naissance ce qu’elles attendent d’elles. Partager des textes, vidéos, épisodes de podcasts. Utiliser sa voix pour créer ses limites avec amour.
– Cultiver un réseau de soutien sûr et sans jugement (professionnels dignes de confiance, autres mères réelles, amis, membres de la famille,…)
– Travailler sur les attentes : Le post-partum n’est pas seulement l’odeur du bébé. C’est aussi des pleurs, de la solitude, de la colère, de la frustration et beaucoup de vulnérabilité. Écrire, méditer, parler de sa perception du post-partum puis laisser de la place à l’inattendu. Votre force sera dans la flexibilité émotionnelle, pas dans le contrôle.
– Rappel pour chaque jour : La mère est aussi importante que le bébé ! Les soins et le confort du bébé sont proportionnels à ceux de la mère. Ici, je suggère d’écrire une lettre à la future maman, avec des mots réconfortants ou un audio à écouter les jours plus tristes et incertains. J’ai enregistré un audio pendant ma grossesse et l’ai écouté plusieurs fois tout au long du post-partum, et cela a été très utile.
En fin de compte, nous ne pouvons pas contrôler une vie imprévisible, toutefois, nous vivons de plans, de rêves, d’objectifs. Et garantir un post-partum aussi léger que possible est obligatoire. Si je devais résumer, ce serait : comment puis-je garantir que je serai nourrie physiquement et émotionnellement ? Qui va m’aider, pour que je puisse me reposer ?
Actuellement, accompagnez-vous les femmes et les couples pendant la grossesse et le post-partum lors de consultations et en partageant des contenus éducatifs. Quelles sont les principales questions qui vous parviennent ? Pensez-vous que les couples sont préparés pour ce qui les attend ?
Peut-être de manière plus rationnelle car l’information circule abondamment, mais de manière plus intuitive et consciente, c’est peut-être là un chemin à parcourir, car cette ère des technologies et de l’information excessive nous éloigne de notre essence. Avec la réalité des maternités au Portugal, les femmes ont peur et veulent s’assurer qu’elles ne passent pas par des processus traumatisants, ce qui se passe aussi lors du post-partum, il y a un besoin de contrôle pour garantir que tout est parfait et qu’aucun traumatisme n’est causé à nos enfants. Les principales questions portent essentiellement sur des questions liées à l’accouchement, comment gérer la douleur, que faire pour éviter la violence obstétrique, comment donner le bain à un bébé, comment changer la couche, comment gérer les pleurs, des questions sur l’allaitement… En profondeur, si l’on approfondit toutes les questions, le grand objectif est de garantir que le bébé va bien.
Que conseillez-vous aux femmes de faire face aux commentaires que la société tend à faire lorsqu’un bébé naît?
Encore une question très nécessaire. Parce que lorsqu’un bébé naît… une « avalanche » de commentaires naît aussi. Beaucoup viennent avec de bonnes intentions, mais peu avec conscience. Et souvent les femmes, encore fragiles et vulnérables lors du post-partum, absorbent ces paroles comme des vérités… alors qu’en réalité, beaucoup sont des projections ou des mythes culturels. Mes suggestions pour les femmes bombardées par des commentaires, souvent inutiles, sont :
– Respirez avant de réagir, choisissez de répondre plutôt que d’absorber. Quand quelqu’un dit « il devrait déjà dormir toute la nuit », ou « tu n’es pas encore revenue à ton corps ? », ou « tu dois faire attention à ne pas trop choyer ». Respirez. Cela en dit plus sur la personne qui parle que sur vous. Dites-vous : « Ce commentaire leur appartient. Je n’ai pas besoin de le prendre avec moi ».
– Créez votre bouclier de protection émotionnelle – Vous pouvez imaginer même un bouclier invisible qui vous protège du bruit extérieur. Avant les rencontres familiales ou les visites, affirmez intérieurement : « J’ai confiance en moi. Je fais de mon mieux. Je n’ai pas besoin de l’approbation de quiconque ».
– Utilisez des réponses courtes, fermes et gentilles (si vous souhaitez répondre). Quelques phrases qui montrent du respect sans se justifier : « Nous faisons ce que nous pensons être le mieux pour nous. »; « Merci, mais nous préférons faire autrement »; « Nous suivons ce que nous avons appris avec notre professionnel de confiance »; « C’est vraiment une période très sensible, ce dont j’ai le plus besoin maintenant, c’est de soutien, pas de conseils » ou encore « Je ne veux pas en parler maintenant »; « Je préfère ne pas aborder ce sujet ».
– Souvenez-vous : votre bébé n’a pas besoin d’une mère parfaite, il a besoin de vous, présente, réelle et authentique. Chaque fois que vous doutez de vous à cause d’un commentaire, demandez : « Cette idée vient-elle de mon intuition… ou de la peur de ne pas plaire ? »
– Entourez-vous de voix qui vous nourrissent, et mettez à distance (ou éloignez-vous) de celles qui vous drains. À cette période, vous avez besoin de vrai soutien. Ceux qui ne respectent pas vos limites ne prennent pas soin de vous. Choisissez d’être avec ceux qui vous écoutent sans vous corriger, ceux qui vous accueillent sans vous juger.
– Prenez soin de votre voix intérieure, pour qu’elle ne devienne pas un écho de la société. Les commentaires externes n’entrent que si votre monde intérieur les autorise. Pratiquez des affirmations quotidiennes: « Je fais confiance à mon instinct »; « Je suis suffisante »; « La maternité m’appartient, pas à la société ».
La façon dont nos ancêtres ont vécu la maternité nous influence.
Comment la façon dont nos grand-mères, nos mères et les autres femmes de la famille ont vécu la maternité peut-elle affecter notre façon de la voir et de la vivre?
Cette question est profonde, elle touche les racines invisibles de notre maternité. Parce qu’avant d’être mères, nous avons été les filles d’autres femmes qui maternent aussi. Et la façon dont elles ont vécu la maternité, souvent avec douleur, silence, sacrifice ou même reniement de soi, modèle, souvent à notre insu, notre façon de l’expérimenter. Alors la façon dont nos ancêtres ont vécu la maternité nous influence. Même sans mots, nous héritons de regards, de peurs, de croyances, de manières d’aimer et de nous annuler. Une autre question est l’épigénétique, la science montre déjà que les traumatismes émotionnels vécus par les grands-mères peuvent affecter la santé mentale et émotionnelle des petites-filles, ce qui signifie que si votre grand-mère a subi un accouchement violent, un deuil non élaboré, une maternité solitaire… cette souffrance non exprimée peut vibrer en vous, non pas comme un destin, mais comme une invitation à la guérison. Ce qui nous affecte également, c’est la façon dont nous avons été élevées, beaucoup d’entre nous sont issues d’une éducation contrôlante et se dirigent vers une éducation permissive, et trouver l’équilibre est un travail quotidien. Beaucoup de femmes se sentent divisées : ou elles essaient de faire tout comme leur mère l’a fait (au nom de la loyauté) ou elles font l’opposé (au nom de la libération). Mais les deux options partent d’une réaction. Le véritable chemin est de demander : “qu’est-ce qui m’appartient vraiment, ici ?”. La douleur qui n’a pas été parlée se transforme en silence en nous. Si votre mère n’a jamais parlé du post-partum, si votre grand-mère n’a jamais dit qu’elle a pleuré, et si personne n’a validé les douleurs de la maternité… il est probable que vous vous sentiez coupable de tout ce que vous ressentez. Que vous pensiez échouer, car « personne ne m’a dit que c’était ainsi ». Ce silence entre les générations crée un vide qui peut nous faire sentir seules, même entourées de personnes.
Quelles sont les principales astuces que vous aimeriez souligner et qui peuvent faire la différence dans la vie des femmes qui sont sur le point de devenir mères ou nouvelles mères?
Quand une femme est sur le point d’être mère, ou vient de l’être, ce dont elle a le plus besoin, ce ne sont pas de formules magiques, mais de vérité, de soutien et de présence. Et de petites grandes astuces peuvent être transformatrices:
– La première est celle que j’ai déjà mentionnée : pensez au post-partum avec la même importance que l’accouchement. Avoir un plan de post-partum réaliste, pratique et adapté aux besoins physiques et émotionnels peut faire la différence;
– Ayez un congélateur plein de nourriture, demandez à la mère, la belle-mère ou un ami de cuisiner ou achetez des repas prêts à l’emploi mais nutritifs, pour garantir qu’au moins pendant un mois (minimum selon moi), vous ne penserez pas à cuisiner. Vous pouvez vous sentir bien, mais croyez-moi, vous devez faire le minimum, car prendre soin d’un bébé est déjà faire le maximum;
– Protégez l’espace physique et émotionnel : Tout le monde n’a pas besoin de voir le bébé dans les premiers jours. Les visites doivent soigner, pas donner du travail. Apprenez à dire « ce n’est pas le bon moment, merci de votre compréhension » ;
– Demander de l’aide et accepter de l’aide est le plus grand acte de courage et d’amour-propre : ce n’est pas un signe de faiblesse. C’est une sagesse ancestrale. Demander de l’aide ne signifie pas être incapable, cela signifie savoir que vous n’êtes pas née pour tout faire seule. Acceptez le dîner qu’on vous propose. Demandez à quelqu’un de tenir le bébé pendant que vous prenez un bain. Déléguez sans culpabilité ;
– Renseignez-vous sur l’allaitement (avant d’en avoir besoin), si tel est votre désir : l’allaitement est naturel, mais n’est pas toujours intuitif. Savoir à quoi s’attendre (descente du lait, prise correcte, signes d’alerte) fait toute la différence. Et, si cela ne se passe pas comme vous l’imaginiez, souvenez-vous : votre valeur en tant que mère ne se mesure pas en millilitres ;
– Parlez-vous avec amour : si vous vous dites « je ne réussis pas », souvenez-vous : Vous réussissez oui, seulement c’est difficile. Et c’est normal, cela fait partie du processus d’adaptation ;
– Validez tous vos sentiments, sans jugement : il est possible d’aimer votre bébé et de vouloir fuir. Se sentir reconnaissant et épuisé. La maternité est paradoxale. Vous n’échouez pas, vous ressentez. Et c’est être humain ;
– Connaître les signes d’alerte de la dépression ou de l’épuisement post-partum et parlez à un psychologue et/ou un psychiatre périnatal (tous ces sujets sont abordés dans mon livre) ;
– Rappelez-vous : votre expérience est valable, même si différente de celle des autres femmes : ne vous comparez pas. Ne cherchez pas à vous ajuster à ce que vous voyez sur les réseaux sociaux. Vous êtes la mère idéale pour votre bébé, avec votre histoire, votre corps, votre temps. Vous n’êtes pas seule. Et vous n’avez pas besoin d’être parfaite pour être merveilleuse.