La « pertinence et l’actualité du texte » face « à cette forme croissante de fascisme, qui semble s’être installée et ne va pas disparaître, bien au contraire », furent des prétextes pour mettre en scène la pièce basée sur le compendium homonyme de 151 leçons pour « apprentis de bons fascistes », écrit par Rui Zink, auteur déjà travaillé à plusieurs reprises par le Teatro de Animação de Setúbal (TAS).
« Rire », « alerter » et, « éventuellement, faire rire les gens » face à « l’augmentation des idéologies radicales et des manifestations croissantes d’extrême droite, un peu partout dans le monde », était l’objectif de la pièce, a déclaré la directrice artistique du TAS.
« Rire pour ne pas pleurer », a dit la metteuse en scène, estimant qu’il est impossible que la société s’abstraie « du fait que, effectivement, la situation peut être dangereuse ». Le danger est aggravé par l’ignorance « des proportions que cela prendra à l’avenir », a-t-elle soutenu.
« Tant qu’il est temps, montrons que nous avons notre mot à dire, d’autant plus que l’avenir semble relativement effrayant si l’on suit cette voie », a argumenté la dramaturge, avec l’accord de Rui Zink.
Ainsi, porter sur les planches « Manuel du bon fasciste » l’année où le TAS célèbre ses 50 ans, étant « un enfant de la liberté et de la démocratie », revêt encore plus de « pertinence », a-t-elle affirmé.
A partir des 151 leçons du « Manuel du bon fasciste », Célia David en a sélectionné plus de 20. Celles qui étaient les plus « adaptables » au théâtre, en y ajoutant des dialogues et « deux ou trois apartés ».
Avant même d’entrer dans la salle du Teatro de Bolso, le public est « accueilli » avec un stylo et un formulaire avec le « Fascistomètre », le « modeste questionnaire » semblable à celui contenu dans l’œuvre originale, tout en étant invité à le remplir.
Le décor de la pièce se fixe sur une chaise dorée et trois micros où pendent autant de fouets. Le jaune, le noir et le gris prédominent dans les costumes des trois personnages, contrastant avec le jaune éclatant du bon fasciste.
Polyvalents, les trois éléments fonctionnent comme un chœur grec, bien que l’ironie et le sarcasme marquent les dialogues. Tantôt dialoguant, tantôt faisant des déclarations ensemble, en tissant des commentaires, le chœur est la « réplique » à l’essentiel que le bon fasciste pourrait dire.
« Tu m’appelles menteur? Tu m’appelles menteur? Personne ne m’appelle menteur, tu entends?! », est l’une des répliques du Bon Fasciste, qui à un certain moment est surnommé « BeF ».
« Et c’est vrai. Personne n’appelle le bon fasciste menteur », entend-on d’un membre du chœur, tandis qu’un autre réplique: « Pas en face de lui, du moins, car il n’est pas homme à se laisser faire ».
Le fasciste « personne ne le fait taire », « il n’est jamais de trop de répéter, le bon fasciste dit toujours la vérité », disent ensemble les trois, à quoi le fasciste ajoute: « peu importe à qui cela fait mal ».
Présentateurs de télévision, animateurs de variétés et chanteurs sont les diverses masques que le chœur revêt tout au long de la pièce en contraste avec le « Bon Fasciste », apparemment normal et inoffensif, toujours en train de se victimiser.
Dans la pièce, avec beaucoup de musique et de chansons entre les deux, on parle aussi du fasciste de gauche, semblable aux questions posées sur « l’existence de bons fascistes de gauche » dans huit leçons de l’œuvre originale.
Les immigrants, les noirs, les homosexuels, les réfugiés sont toujours mal vus et mal traités par le Bon Fasciste, pour qui les femmes sont également une cible à abattre.
À un certain moment de la pièce, il est demandé à certains spectateurs de fournir au chœur le « Fascistomètre » rempli, qui sera ensuite évalué selon l’œuvre originale, « même si les réponses ne sont pas prises très au sérieux ».
La pièce peut également être utilisée pour que les gens découvrent s’ils « possèdent de nombreux tics de fasciste »: « À l’instar de ce qui est arrivé aux acteurs, au fur et à mesure qu’ils lisaient l’œuvre et mettaient en scène la pièce, et qu’au jour le jour, ils essaient de se débarrasser de ces tics ».
Au Teatro de Bolso, la pièce aura six autres représentations, en plus de la première: vendredi et samedi et les 05, 06, 12 et 13 décembre, toutes à 21h30. Les trois premières dates sont déjà complètes.
Le spectacle est interprété par Cristina Cavalinhos, en tant qu’actrice invitée, Andreia Trindade, Cláudia Aguizo et André Moniz, qui assiste également à la mise en scène.
Avec les voix hors-champ de Célia David, Duarte Victor et Miguel Assis, la chorégraphie est de Carlos Prado, la scénographie de Flávio Rina et les costumes et accessoires de Sara Rodrigues. La conception des éclairages est assurée par José Santos, la sonorisation par Luís Oliveira et la technique par Celso Ferreira.
