Loures. Des dizaines de bénévoles et de techniciens nettoient un quartier qui est devenu une décharge.

Loures. Des dizaines de bénévoles et de techniciens nettoient un quartier qui est devenu une décharge.
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Les bras ne sont pas nombreux pour tout ce qu’il y a à faire, mais une cinquantaine de bénévoles a répondu à l’appel lancé par le mouvement Vida Justa pour se rendre au Talude Militar et aider à nettoyer les débris laissés par la démolition.

L' »action de solidarité », cet « acte de fraternité », visait à « redonner un peu de dignité qu’ils ont enlevée [aux habitants du quartier] » et, en même temps, « essayer de garder la zone propre, retirer ce que la communauté ne souhaite plus et (…) aider aussi à ranger les affaires des personnes laissées à elles-mêmes », explique José Pina, bénévole de Vida Justa.

Un groupe s’occupe de ramasser les déchets, un autre de trier les matériaux non endommagés, notamment les panneaux de zinc et les morceaux de bois, qui peuvent être réutilisés.

Sous un parasol, une équipe gère les dons alimentaires reçus et assure des repas aux dizaines d’hommes, de femmes, d’enfants et de bébés qui restent au Talude Militar, passant la nuit dans des tentes érigées là où se trouvaient auparavant leurs maisons.

La municipalité de Loures a commencé lundi une opération de démolition de 64 logements précaires, où vivent 161 personnes.

En deux jours, 55 logements ont été démolis, avant la suspension des opérations par décision d’un tribunal de Lisbonne, à la suite d’un recours engagé par 14 habitants.

L’aide apportée aux habitants du Talude est importante, affirme Carla Santos, habitante de la commune et l’une des coordinatrices de la distribution de nourriture et d’eau, notant que ce qui manque le plus à ce stade, ce sont des repas prêts à manger, car il n’y a pas de conditions sur le terrain pour cuisiner.

Dans la société récréative à proximité, les habitants peuvent stocker les affaires qu’ils souhaitent conserver et ont accès à des douches pour prendre un bain en fin de journée, ce qui est essentiel pour pouvoir aller travailler le lendemain.

« La plupart travaillent (…), il y a même des gens qui travaillent pour des entreprises prestataire de services à la mairie, (…) des personnes qui travaillent dans des entreprises comme Carris Metropolitana, (…) des personnes qui travaillent dans des maisons de retraite qui prennent soin de nos personnes âgées », décrit Kedy Santos, député municipal de la CDU à Loures qui s’est porté volontaire pour aider au nettoyage.

« Ces personnes ne sont pas ici pour bénéficier de faveurs, elles n’attendent pas presque une aide sociale. (…) Si ici il y a deux personnes dépendant d’une subvention, c’est un miracle, elles n’ont même pas la capacité d’y recourir », souligne-t-il.

« Nous avons beaucoup d’enfants qui sont scolarisés et la réalité est que nous sommes en période de vacances scolaires, les parents doivent travailler », ajoute Carla Santos, en indiquant que des associations locales offrent des activités aux mineurs.

À la société civile se sont joints « environ 40 » techniciens, dans une opération conjointe des SIMAR (services municipaux de Loures et Odivelas) et de la municipalité de Loures, auxquels se sont ajoutés les conseils de paroisse de Santo António dos Cavaleiros et Camarate, Unhos e Apelação.

Lors des opérations, ils utilisent une rétrocaveuse, trois camions-grue, trois autres sans grue, et un conteneur à déchets de 20 mètres cubes, ont expliqué sur le terrain deux techniciens des SIMAR, ajoutant qu’ils procèdent à la séparation des matériaux et des déchets.

En soulignant qu’ils ont été « bien accueillis » par la population, ils considèrent que l’opération est « assez difficile », avec le risque de durer « deux jours de travail, en allant bien et avec tous les moyens disponibles ».

« Mais jusqu’à présent, cela se passe très bien », évalue l’un d’eux, racontant que les techniciens n’ont été « mobilisés que hier soir [vendredi] », après que Vida Justa a programmé l’action de nettoyage volontaire.

Kedy Santos estime que les techniciens envoyés dans le quartier ont fait preuve « d’empathie » face à la situation et souligne que les habitants et les militants ont toujours souhaité dialoguer pour trouver une solution.

« Nous avons convenu avec eux qu’ils enlèveraient les déchets », déclare-t-il, remerciant les employés municipaux qui, « d’une manière ardue », collaborent aux opérations de nettoyage.

« Il n’était pas nécessaire que nous soyons tous ici, quasiment comme des fous, à faire ce travail (…), si la démolition avait été faite de manière contrôlée, adéquate, pas presque de manière autoritaire et disproportionnée », critique-t-il.

D’autre part, il n’y a « aucune information du gouvernement », qui reste « dans le silence, dans les vallées de la déchéance », déplore-t-il.

Pour le député municipal, « nous avons tous une responsabilité, ce n’est pas seulement la municipalité », qu’il continue de critiquer pour ne pas offrir de « solutions adaptées ».

Certains « candidats députés, candidats à la mairie », « ont menti (…) en disant qu’ils ont parlé aux gens », souligne-t-il, critiquant « certains qui ne se sont même pas approchés de ces personnes, qui pensent qu’elles n’existent pas ».

Ils sont « des présents inconnus », décrit Carla Santos, « née et élevée » dans la zone et qui a commencé à soutenir le Talude Militar encore dans les années 1990.

« Même par le chemin que nous devons emprunter, seuls ceux qui vivent ici, seuls ceux qui ont des amis ici connaissent le lieu, le territoire, sinon les gens passent par la paroisse et ne savent même pas que cela existe », souligne l’anthropologue.

« Les problèmes structurels se résolvent par des solutions structurelles et il y a ici de nombreux problèmes sociaux, pas seulement la question du logement. Il y a beaucoup d’autres choses qui sont inhérentes et pour lesquelles il faut trouver des réponses et nous mélangeons tout », alerte-t-elle.

« Au Portugal, ce que nous faisons, c’est de l’intervention sociale collective », déplore-t-elle, demandant des « volontés politiques » et l’intervention d’organisations sociales « renforcées ».