Dans des déclarations à l’agence Lusa, Sónia Neto, ancienne Conseillère pour l’Afrique au sein du Groupe de Réflexion du Président de la Commission Européenne (d’abord avec Durão Barroso, puis avec Jean-Claude Junker) et ambassadrice de l’Union Européenne en Guinée-Bissau, a souligné, après plus d’un an de réunions culminant avec la signature de l’accord, « l’art de la négociation de la diplomatie portugaise », qui « constituent encore aujourd’hui une référence intemporelle ».
« Ils ont réussi, en effet, à faire asseoir à la même table [les parties en conflit — le gouvernement du MPLA et l’UNITA] et ont réussi à les convaincre que la paix était possible par le dialogue, leur montrant que le conflit pouvait être résolu à la table des négociations (…) indépendamment de leurs opinions divergentes, de leurs sentiments, de leurs tendances politiques », a-t-elle déclaré.
Dans le livre, Sónia Neto a recueilli les témoignages de 22 participants à la longue série de négociations qui, pour la première fois, ont vu des membres du gouvernement angolais (dirigé par le Mouvement Populaire de Libération de l’Angola, MPLA, alors parti unique) et de l’Union Nationale pour l’Indépendance Totale de l’Angola (UNITA) s’asseoir face à face, sous la médiation du Portugal et avec les États-Unis et l’Union Soviétique comme observateurs.
Douze de ces protagonistes seront présents à la cérémonie de lancement du livre, qui se déroulera dans la même salle (au Ministère des Affaires Étrangères) où l’ancien Président angolais, José Eduardo dos Santos, et le leader de l’UNITA, Jonas Savimbi (tous deux décédés), ont signé, le 31 mai 1991, sous le regard du Premier ministre portugais de l’époque, Aníbal Cavaco Silva, les accords qui ont mis fin aux hostilités et ouvert la voie à la révision constitutionnelle qui a mis fin au régime du parti unique et permis la tenue des premières élections libres dans le pays (en septembre 1992).
Cavaco Silva fera la présentation du livre, suivie d’un panel de discussion sur les Accords de Bicesse avec Durão Barroso (alors Secrétaire d’État des Affaires Étrangères qui a conduit les négociations) et les généraux angolais António dos Santos França « Ndalu » et Peregrino Isidro Wambu Chindondo.
Bien qu’ils n’aient permis qu’une courte période de paix dans la longue guerre civile angolaise, reprise après les élections suite au rejet de la victoire du MPLA par l’UNITA, « en substance, les Accords de Bicesse restent aujourd’hui l’héritage historique et également l’accord mère pour ce qui existe aujourd’hui en Angola, à savoir le multipartisme et des forces armées unifiées », a souligné Sónia Neto.
L’idée du livre est née lors d’un dîner qu’elle avait été chargée d’organiser avec tous les protagonistes, à Luanda, en marge de la visite officielle que le président de la Commission Européenne de l’époque, Durão Barroso, avait effectuée en Angola en 2012.
« Ce jour-là, j’ai réalisé que l’esprit Bicesse était présent et là, est née ma conviction qu’ils devaient être inscrits dans l’histoire et, surtout pour les générations futures, qu’ils devaient être racontés par eux dans une seule œuvre pour que tout le monde sache que (…) ces hommes (…) avaient le courage et la vision de négocier en temps de guerre », a-t-elle déclaré à Lusa.
Sónia Neto souligne le fait que dans tous les témoignages, il y a « un sentiment transversal de patriotisme, de mission accomplie, une inquiétude causée par un bien supérieur et un profond amour pour l’Angola ».
« Je crois qu’il y avait là un objectif et qu’il y avait quelque chose qui unissait beaucoup, dont j’aime beaucoup parler, qui est le sentiment d’unité des Angolais, qui était très vivant dans ces négociations, c’est un sentiment d’angolanité », a-t-elle ajouté.
Pour le succès de Bicesse, l’aspect humain comptait également, le fait que les délégations étaient dans un même espace — à l’École Supérieure de l’Hôtellerie de Bicesse (Estoril) —, où elles ont finalement célébré des anniversaires et remémoré des liens antérieurs à la guerre.
« Il s’est créé là un sentiment d’amitié et (…) avec pour seul objectif qui les unissait et que je pense être véritablement transversal dans tous les témoignages, qui est le sentiment de patriotisme, de mission accomplie et, surtout, la paix pour l’Angola et la paix que le peuple angolais attendait tant et méritait », a-t-elle renforcé.
L’accord a eu lieu dans un contexte international favorable, que le Portugal a su percevoir, grâce « à l’excellente analyse de la part du Premier ministre de l’époque, Cavaco Silva, suivie du négociateur sur le terrain, le docteur Durão Barroso, (…) qui, en fin de compte, leur a permis de tracer la stratégie pour que ces accords aient le succès qu’ils ont eu, jusqu’aux élections », a-t-elle signalé.
