Lors du Congrès Européen des Banques tenu à Francfort, Lagarde a alerté sur la perte de compétitivité de l’Europe et sur le fait que les exportations, sur lesquelles reposait la croissance européenne, ne sont plus le moteur de l’économie en raison des tensions commerciales et de l’augmentation de la compétitivité mondiale.
Lagarde a déclaré qu’il est important que les barrières internes du marché européen « soient suffisamment basses pour que les secteurs qui façonneront la croissance future opèrent sur un marché véritablement européen ».
Mais les barrières ne sont pas suffisamment basses dans le secteur des services numériques, qui mèneront à l’innovation future, ni sur les marchés des capitaux.
Les barrières internes dans la zone euro ne sont pas moindres que les barrières externes, en particulier dans le secteur des services.
« Au cours des 20 dernières années, les barrières au commerce transfrontalier au sein de l’Europe n’ont pas diminué plus rapidement que celles que les entreprises internationales rencontrent pour opérer ici », a déclaré Lagarde.
Pour cette raison, a ajouté la présidente de la BCE, bien que les services représentent désormais les trois quarts de l’économie européenne, le commerce des services au sein de l’Union Européenne (UE) ne représente qu’un sixième du Produit Intérieur Brut (PIB), soit la même proportion que le commerce des services avec le reste du monde.
Lagarde estime que l’Europe peut compenser l’effet négatif de l’augmentation des tarifs des États-Unis en réduisant les barrières internes et recommande que de nombreuses décisions soient approuvées à la majorité qualifiée.
Les barrières internes sur les services et les biens équivalent à des tarifs de 100% et 65%, respectivement, selon la BCE.
S’il tous les pays de l’UE réduisaient leurs barrières au même niveau que ceux des Pays-Bas, les barrières internes pourraient chuter de huit points de pourcentage pour les biens et de neuf points de pourcentage pour les services.
« Si nous faisions ne serait-ce qu’un quart de cela, cela suffirait à stimuler suffisamment le commerce interne pour compenser l’impact des tarifs américains sur la croissance », a estimé Lagarde.
Cette réduction des barrières augmenterait le commerce au sein de l’UE d’environ 3%, ce qui compenserait la réduction de 0,7 point de pourcentage de la croissance du PIB entre 2025 et 2027 causée par les tarifs américains et l’incertitude, selon les calculs de la BCE.
Pour cela, Lagarde a indiqué qu’il est nécessaire que, « si un bien ou un service est légalement prévu dans un État membre, il soit autorisé à circuler librement dans l’UE sans qu’il soit nécessaire de se conformer à d’autres lois de tous les autres pays ».
Il en va de même pour l’économie numérique et les marchés numériques, selon la présidente de la BCE.
« La reconnaissance mutuelle des identités numériques, des services de confiance et d’autres références améliorerait considérablement l’interopérabilité et éliminerait les coûts cachés qui freinent la croissance des marchés numériques de l’Europe », a souligné Lagarde.
De même, Lagarde a recommandé que les décisions en Europe soient approuvées par majorité qualifiée dans les domaines dont dépend sa croissance future et non à l’unanimité, comme c’est le cas actuellement.
« Dans plusieurs domaines critiques, l’exigence continue de l’unanimité au Conseil Européen empêche encore des progrès significatifs pour compléter le marché unique », a averti Lagarde.
Un exemple clair auquel elle a fait référence est l’harmonisation de la TVA ou l’établissement d’un impôt sur les sociétés commun, qui restent bloqués en raison des vetos nationaux, de sorte que les entreprises doivent naviguer dans « un labyrinthe de régimes fiscaux fragmentés ».
Cela nuit aux entreprises de plateformes numériques qui fournissent des services de cloud et de logiciels en Europe, car elles doivent se conformer à 27 systèmes de TVA différents, a-t-elle averti.
« L’utilisation du vote à la majorité qualifiée – en utilisant la clause passerelle lorsque nécessaire -« , pourrait aider à briser cet impasse, a proposé Lagarde.
